Parmi les miens

Parmi les miens

Ce dimanche matin a un air printanier. Et même si la chaleur du soleil ne parvient pas à faire oublier le vent glacial, l’idée d’une escapade vient tout naturellement. Justement, mon frère me propose de l’accompagner avec ses amis à une brocante. Non pas la brocante de village habituelle, celle où l’on trouve par douzaines des tasses orphelines, des assiettes aux décors improbables ou des vêtements que même Cloclo refuserait de porter aujourd’hui. Rien de tout cela ici. Le petit village où nous nous rendons devient l’espace d’une journée le rassemblement des amateurs de tôle souvent froissée et de mécaniques toujours cahotantes, un rassemblement d’amateurs de voitures anciennes.

La manifestation est modeste mais l’enthousiasme n’en est pas moins là, et les visiteurs se pressent devant les quelques modèles exposés de chaque côté de la rue. Nous nous attardons juste ce qu’il faut pour ne pas être congelés sur place et rejoignons le lieu de la brocante. Les moins chanceux des exposants ont hérité d’un stand en plein air. On mesure ici toute la passion de ces marchands amateurs qui tapent des pieds et soufflent dans leur main en attendant l’acheteur providentiel. Ici, tout ce qui peut se rapporter de près ou de loin à l’univers de l’automobile peut se trouver. En témoigne cette collection de panneaux indicateurs au milieu desquels trône un matelas pneumatique Fina des années 70 (notez la mise en scène à la fois coquine et républicaine).

Après un rapide tour, nous nous pressons comme beaucoup vers l’intérieur de la salle de sport. Ici l’ambiance est plus animée, les travées d’exposant remplissent la salle et la relative chaleur n’est pas pour rien dans ce regain d’animation. Il faut être connaisseur et savoir ce que l’on cherche pour s’y retrouver dans ce capharnaüm d’objets : pièces mécaniques, phares, roues, ampoules, manuels mécaniques, bidons d’huile, compteurs, fusibles, boutons en tout genre, poignées de porte, voitures miniatures, affiches publicitaires, porte-clés, etc, etc.

Mon frère qui cherchait des enjoliveurs pour sa dernière acquisition n’a pas trouvé son bonheur, il faut dire que rien n’est étiqueté et que la plupart des objets sont empilés sans ménagement. En une heure nous avions fait le tour, direction le bar pour un vin chaud salvateur.

Au retour, nous passons déposer chez lui un des amis de mon frère. C’est un jeune dans la vingtaine qui perpétue la passion de son père pour les tracteurs anciens. Ils en ont plusieurs dizaines (centaines peut être) qu’ils vont chercher aux quatre coins d’Europe et qu’ils restaurent. Il nous montre quelques exemplaires de sa collection dont ce Case de 1906 entièrement restauré (il ne restait que le moteur et le châssis) et le seul exemplaire encore roulant.

De retour en région parisienne, j’ai conscience que cette matinée est de celle qui font les bons souvenirs, les souvenirs que l’on n’oublie plus. Le fait d’avoir partagé un moment avec mon frère, que je ne vois pas souvent y est pour beaucoup. Celui d’être au contact de la vie provinciale aussi, tellement j’ai perdu ce lien avec ces réalités si éloignées des artifices de la vie citadine. Tout simplement d’être parmi les miens. Mais il me semble aussi que la rencontre d’autres passionnés et la partage de leur passion joue pour beaucoup. Je réalise à quel point la passion que j’éprouve pour la photographie a quelque chose d’universel avec tous les passionnés quelqu’ils soient. Réussir à transmettre sa passion même lorsqu’elle touche quelqu’un qui y est à priori étranger rend heureux aussi bien celui qui donne que celui reçoit. La découverte de cet univers, de ce passionné de tracteurs anciens, du partage de quelque chose qui m’était inconnu a été un moment unique et merveilleux.

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