Le XF 23 f/1.4 R face au X100T
Si l’on possède un hybride Fuji X et que l’on cherche un objectif équivalent 35mm, le Fuji XF 23 f/1.4 R s’impose. Mais si l’on a déjà mis l’oeil au viseur d’un X100/X100S/X100T, là, les choses se compliquent pour faire un choix. C’est exactement la situation dans laquelle je me suis retrouvé il y a quelques semaines, possédant un Fuji X100 et un X-E2 : remplacer mon X100 par un X100T ou bien opter pour le XF 23 ? Si vous êtes un lecteur attentif, vous connaissez déjà la fin de l’histoire. J’ai préféré le X100T mais ce choix s’est fait sans avoir réellement eu l’occasion de tester le XF 23. Grâce à Fujifilm France, que je remercie sincèrement, j’ai pu disposer pendant quelques jours de ce qui est un des objectifs phares de la gamme Fujinon et vérifier si mon choix était le bon.
XF 23 f/1.4 R
Le Fuji XF 23 est un objectif qui inspire un sentiment de qualité. Relativement imposant (nous y reviendrons), tout en métal, on sent que l’on a entre les mains un objet qui a été conçu pour rivaliser avec les meilleurs des objectifs premium full frame. Comparé au reste de la gamme, et tenant compte de sa focale relativement courte, il est un des plus gros. Le XF 35 f/1.4 R à côté semble tout léger et minuscule. Il a d’ailleurs un diamètre de 10mm inférieur aux 62mm du XF 23. En réalité, l’encombrement du XF 23 est très proche de celui du XF 18-55 f2.8-4 R:
Sur la balance, il accuse également le coup : 296g pour le XF 23 contre 185 g pour le XF 35. C’est même presque le poids du 18-55 f/2.8-4 R et ses 307g.
Le XF 23 dispose d’une bague de mise au point large et précise. Elle permet en la faisant coulisser de verrouiller la mise au point, un dispositif présent seulement sur quelques objectifs de la gamme (à ma connaissance au moins le 14mm mais il y en a peut-être d’autres). Elle permet simplement de passer en mode manuel lorsqu’on est en autofocus (ou d’empêcher de tourner la bague de MAP lorsqu’on est en autofocus). Elle n’a aucune action en mise au point manuelle. Avec la possibilité de modification du point manuellement même en autofocus apportée par les dernières versions du firmware du X-E2 et du X-T1, l’utilité est toute relative.
La bague de sélection des ouvertures semble plus sensible que celle du X100T mais propose une ergonomie bien meilleure, car c’est une vraie bague, que l’on retrouve facilement sous les doigts. Le X100T de son côté, propose une bague minuscule que l’on ne peut manipuler qu’au travers de deux ergots pas très pratiques : à l’aveugle, il faut tâtonner pour retrouver leur position et tourner la bague. Je trouve très étonnant que Fujifilm n’ait pas amélioré cette bague après trois générations de X100. Le XF 23 dispose également d’une échelle de distance et de profondeur de champ gravée sur le fût. La marque des objectifs sérieux.
Pour une revue complète et technique, je vous renvoie vers cet excellent article qui viendra compléter mes explications sommaires : http://www.photozone.de/fuji_x/868-fuji23f14
Le XF 23 f/1.4 R face au X100T
Un des principaux aspects qui peuvent motiver le choix entre ces deux options est évidemment l’encombrement respectif. Voici ce que donne le XF 23 monté sur le X-E2 et le X100T côte à côte.
C’est sans appel, l’encombrement presque le double, la preuve en empilant le X100 et le X100T (désolé je n’avais pas deux X100T sous la main…)
Vu de face le diamètre imposant du XF23 donne au X100T une allure de jouet :
Là encore, j’ai passé tout ce petit monde sur la balance : 640 g pour le X-E2 + XF 23 contre 432 g pour le X100T, c’est 50% plus lourd.
Au-delà de ces chiffres qui peuvent ne pas être un problème en fonction de votre activité, de la taille de votre sac et de la solidité de vos épaules, il est intéressant de voir si cette version bodybuildée du 23mm n’est là que pour montrer ses muscles ou bien si elle dispose d’atouts indiscutables. On attend deux avantages significatifs du XF 23 sur le X100T : la qualité optique et le gain en ouverture. Pour cela, rien de tel qu’un test sur le terrain. J’ai pu faire deux sorties relativement différentes qui m’ont permis de juger de la versatilité de l’objectif versus le X100T
Jour 1 : dans la rue
Cette première sortie est l’occasion de tenter quelques photos de rue avec le XF 23. Monté sur le X-E2, j’ai réellement l’impression d’avoir en main mon combo de voyage en terme d’encombrement (le XF 18-55). L’absence de vraie poignée sur le X-E2 rend la tenue de l’ensemble assez délicate à la longue, surtout si, comme moi, vous aimez avoir l’appareil en main sans courroie ni dragonne. La seule solution est de tenir l’ensemble par le fût de l’objectif, tenue ici facilitée par le diamètre imposant de l’objectif.
La mise au point est rapide, bien plus véloce que celle du XF 35. Associé à l’autofocus du X-E2, on peut réaliser ce type de prise de vue sans difficulté :
L’ouverture f/1.4 offre des fonds flous plutôt doux, très plaisants.
Le piqué est fantastique, sans atteindre néanmoins ce que j’ai pu obtenir avec du full frame. Mais on en est très proche.
Un détail sur une autre image à 100% (pour les amateurs) pour s’en convaincre
Au bout de deux heures, le poids de l’ensemble se fait vraiment sentir. On n’est pas encore sur le poids d’un réflexe, mais la promesse de l’appareil hybride offrant compacité et légèreté est un peu malmenée. Habitué à arpenter les rues avec mon X100T, j’avoue ne pas avoir la même sensation de liberté avec cet ensemble. Pour la photo de rue, il est évident que le X100T est bien plus adapté : léger et discret.
Jour 2 : en mode paysage
D’accord, on parle ici de paysage urbain mais c’est surtout le mode de photographie qui m’intéresse de développer ici. On n’est plus dans la recherche de la spontanéité et de la réactivité nécessaire à la photo sur le vif. En mode paysage, on peut se permettre de prendre le temps de cadrer, régler et déclencher quand on est vraiment prêt. On peut même se permettre d’avoir l’appareil autour du cou ce qui fait oublier le poids de l’ensemble. Je dirais même que ce poids donne l’impression d’avoir un vrai appareil photo dans les mains : on ressent la technologie, un peu comme je l’avais décrit lors de la dernière utilisation de mon réflex.
Au fil de l’après-midi, j’apprécie de plus en plus l’ergonomie de l’objectif : les commandes tombent sous les doigts, en particulier la large bague de mise au point. Je regrette évidemment la lenteur de l’affichage des changements d’ouverture dans le viseur, mais l’objectif n’est pas en cause : un point sur lequel Fuji doit faire de sérieux progrès sur ces futurs modèles d’appareils. Le 35mm se trouve plutôt bien adapté à mon sujet, me permettant d’embrasser suffisamment d’éléments dans le cadre. Ce que je vois sur l’écran du X-E2 me plait beaucoup, une qualité d’images qui se confirmera sur l’ordinateur.
Comparer
Un des éléments importants pour beaucoup de photographes, est le flou d’arrière-plan, même si je trouve que l’on met souvent trop en avant cette caractéristique des objectifs actuels. C’est un peu comme si on ne photographiait qu’à pleine ouverture. Bref, on peut quand même les comparer. Pour commencer, les deux objectifs sont à pleine ouverture (f/1.4 pour le XF 23 à gauche, f/2.0 pour le X100T à droite) :
Le flou est effectivement plus doux sur le XF 23. Si on compare à ouverture égale (f/2.0 avec le XF 23 toujours à gauche et le X100T à droite) :
Les différences ne sont pas franchement flagrantes. Je défie quiconque de les distinguer à l’aveugle. On note également une différence de colorimétrie assez importante mais que je ne peux attribuer aux objectifs, les appareils ont certainement un impact non négligeable. Par contre, une frange foncée apparaît sur les bords des images du XF 23. Je n’ose croire à de l’aberration chromatique…
Je complète avec des images entières, car le 100%, ce n’est pas la vraie vie. D’ailleurs, c’est sur ces images « plein écran » que l’on voit la légère différence de flou, à l’avantage du XF 23 évidemment.
Lequel choisir ?
Le XF 23 f/1.4 R est une bête de course. Il en impose d’emblée par sa construction sérieuse et sa taille. Les images qu’il produit sont d’une netteté impressionnante. Il bat à plat de coutures le X100T sur ce point. Son ouverture à f/1.4 lui donne un avantage en basse lumière en doublant la quantité de lumière entrante par rapport au X100T . Par contre si vous cherchez le fameux bokeh, n’attendez pas trop de différence avec le X100T, ils se valent.
Les deux principaux facteurs de choix vont donc se jouer sur la qualité d’image et l’encombrement. En fonction du type de photographie que vous pratiquez mais aussi des exigences que vous pouvez avoir avec le résultat, le choix peut s’orienter vers l’un ou l’autre :
- le XF 23 conviendra parfaitement aux photographes professionnels, aux photographes de mariage, de portrait ou de mode. Il est réservé à ceux qui voudront privilégier la qualité d’image sur le poids du matériel
- le X100T est un choix du coeur. Son poids et son encombrement raisonnables en font l’outil idéal pour la photographie de rue mais aussi pour la photographie au quotidien (les photos que l’on manquait à l’époque ou seuls les réflexes existaient).
Un dernier point non négligeable est la question du prix. Il faut compter environ 850€ pour le XF 23 contre 1 140€ pour le X100. Il y a 290€ d’écart, 290€ qui vous permettent d’avoir un appareil complet.
Ces tests comparés confortent donc complètement mon choix. J’ai besoin d’un appareil que je peux avoir sur moi à tout moment et qui me permet d’être relativement discret dans la rue : le X100T est parfait pour cela. Et tant pis pour le piqué de mes images, en photo de rue ce n’est pas vraiment ce qui compte.
En complément de mon article, je vous joins deux liens intéressants :
- Le X100T n’est pas en compétition avec le X-E2 : http://weshootfuji.com/2015/03/18/the-unbelievable-truth-about-the-fuji-x100t/
- Cependant si vous voulez (ou devez) faire un choix : http://www.mirrorlessons.com/2015/03/16/fuji-x100t-vs-xt1/